Kava et chauve-souris: à table chez les Kanak
Il est une tradition bien ancrée dans les îles du Pacifique Sud: le kava. Cette boisson opaque et marron aux vertus relaxantes est faite de racines de piper methysticum, une variété de poivrier; autrefois, on les mâchait longuement puis on les recrachait, aujourd’hui, on se contente de les râper avant de les filtrer et de les mélanger à de l’eau.
En Nouvelle-Calédonie, le kava se boit au nakamal (bar à kava) que l’on repère au bord des routes grâce à la petite lanterne allumée signifiant que le kava est prêt. On commence à boire entre chien et loup, jusque tard dans la nuit, lorsque le grand bol en bois qui contient la boisson est vidé. Le goût? C’est un peu comme boire de l’eau boueuse goûtant la noix muscade... Précisons que le kava est interdit dans certaines régions car, bien qu’il ne produise pas d’accoutumance, il est souvent considéré comme une « drogue légale », tolérée si consommée à petite dose!
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Expériences culinaires insolites
Si je vous dis que l’effet du kava m’a rappelé l’anesthésiant que met le dentiste sur les gencives avant d’opérer, vous aurez tout compris! Le kava permet de se détendre, de soigner maux de tête et douleurs le cas échéant. Oublions le goût car c'est pour l’atmosphère du nakamal qu’il faut faire l’expérience. Moi, c’était à Lifou, l’une des îles de Nouvelle-Calédonie où les Kanak m’ont appris à boire le kava. Car en Nouvelle-Calédonie où la tradition du kava n’est pas très ancienne, les femmes peuvent venir au nakamal. ce qui n’est pas le cas partout dans le Pacifique où cette boisson, autrefois sacrée, était bue par les hommes, les chefs de tribus, notamment. Malgré tout, ce sont plutôt les hommes qui vont au nakamal encore aujourd’hui!
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Par une belle soirée un peu fraîche (on entrait dans l’hiver austral), nous étions assis en rond autour d’un feu de braises, ça parlait doucement, certains convives jouaient quelques accords de guitare lancinants, et on buvait notre kava dans une coquille en noix de coco, de préférence cul-sec. Le Kava est bien plus qu’une boisson : c’est un signe d’amitié quand on vous l’offre.
Ce n’est pas la seule expérience insolite (pour une Occidentale) que j’ai faite en Nouvelle-Calédonie : j’ai aussi, je le confesse, manger de la roussette… Oui, une chauve-souris! C’est un plat réputé en Mélanésie, comme le crabe de cocotier ou les crevettes de criques, et ma foi, ce n’est pas si mal. La roussette, c’est comme une caille un peu sèche qui, bien apprêtée (moi, c’était une sauce à l’orange), se laisse volontiers manger. Soyez rassurés: on peut vous la servir sans la tête dans l’assiette...
Pour autant, quand j’ai vu l’animal vivant, qui peut faire jusqu’à 1,50m d’envergure les ailes déployées, qui a deux petites billes noires sur sa jolie tête et qui est frugivore, je ne suis dit qu’y goûter une fois, c’était suffisant!